par dalla favera » Mar Déc 16, 2014 6:40 pm
Article dans la tribune
La défense contre-attaque dans les affaires qui ternissent la réputation du club de football Evian Thonon Gaillard (eTG) depuis une année. Son ancien président Patrick Trotignon a délivré lundi par l'intermédiaire de son avocat une assignation en justice à l'encontre du club pour révocation abusive et atteinte à l'honneur. L'ancien homme fort du Servette de Genève réclame à Haute-Savoie Football Développement (HSFD), la holding qui détient la quasi-totalité d'eTG, 1,5 million d'euros à titre de préjudice moral.
Patrick Trotignon est également attaqué. Son avocat est assigné à comparaître ce jeudi devant le Tribunal de Thonon. Le club du sud du Léman lui réclame pas moins de 6 millions d'euros pour faute de gestion.
«Ascension météorique»
L'histoire avait pourtant très bien commencé. En 2008, lorsque Patrick Trotignon arrive de Châteauroux où il dirigeait la Berrichonne, l'équipe évoluait encore dans le championnat de France amateur, la quatrième division du foot hexagonal. Pour le développer, le nouveau président attire des sponsors, dont le groupe Danone qui deviendra son principal mécène, mais aussi des actionnaires: un homme d'affaires irano-suisse résidant à Genève dont on ne sait presque rien, Esfandiar Bakhtiar (42% des parts; lire ci-contre), un entrepreneur haut-savoyard, Richard Tumbach (16%), et les «Parisiens», 34 personnalités qui se partagent 35% des titres (lire ci-dessous). Avec l'aide de Danone, Patrick Trotignon a en outre fait construire un centre de formation à Blonay, à Publier, pour former la relève.
Cette structure solide et des excellents résultats sur les pelouses permettent au club de grimper en National en 2009, puis dans la foulée en Ligue 2 et en Ligue 1 en 2012-2013, saison dans laquelle l'équipe arrive même en finale de la Coupe de France. «Cette ascension est météorique», commente André Soulier, un actionnaire qui a accepté de commenter la situation pour la Tribune.
Cet homme politique français se réjouit beaucoup moins depuis l'éviction surprise de Patrick Trotignon en 2013 à la veille de Noël. Ce dernier est soudainement accusé d'avoir commis de graves erreurs de gestion dans le transfert de deux joueurs. Selon un bon connaisseur du dossier, l'arrivée précipitée d'eTG au meilleur niveau aurait plutôt fait perdre la tête à ses dirigeants, les deux actionnaires principaux, Esfandiar Bakhtiar et Richard Tumbach, mais aussi à la famille Dupraz, historiquement liée au club. Tous craindraient de perdre de leur influence. Contactés, ces derniers n'ont pas souhaité commenter.
Danone a annoncé en mars retirer son soutien à l'équipe professionnelle. Les 34 Parisiens veulent aussi s'en aller. Ces derniers sont en train de céder leur part à un richissime industriel savoyard, Yves Bontaz, le patron d'un équipementier automobile employant plus de 2500 salariés dans le monde. Vendu ou presque. Les dirigeants du club refusent cette transaction, soulignant qu'un sponsor ne peut aussi devenir actionnaire. Il y a conflit d'intérêt, estime Esfandiar Bakhtiar, dans une des rares interviews qu'il a accordées à la presse en juin.
Depuis le retrait de Danone, Bontaz Centre et MSC Croisières sont les principaux sponsors. Messieurs Bakhtiar et Tumbach, eux, ont seulement mis 580'000 euros (respectivement 420'000 et 160'000 euros) dans la holding en 2009. Dans le budget du club évalué à 30 millions d'euros, c'est peu. Infime comparé aux quelque 25 millions que Danone a injectés dans l'aventure ces cinq dernières années.
Querelles d'actionnaires
Les dirigeants du club sont autorisés à refuser l'entrée d'Yves Bontaz. A une condition: qu'ils fassent une contre-offre au moins similaire. Pour les 35%, Yves Bontaz a mis 2,3 millions d'euros sur la table, près de sept fois plus que ce que Messieurs Bakhtiar et Tumbach.
Un expert, Maurice Nussenbaum, doit trancher sur l'offre de Bontaz. Selon une source proche du dossier, il estime la valeur de l'eTG à plus de sept millions d'euros. Autrement dit, selon cette estimation, Yves Bontaz pourrait même proposer davantage pour les parts qu'il convoite!
D'un côté, pour les deux principaux actionnaires actuels, c'est une bonne nouvelle: les 58% qu'ils ont acquis en 2008 pour 580'000 euros vaudraient du coup sept fois plus. L'arrivée du grand sponsor contribuerait même à augmenter la valeur du club. Plusieurs connaisseurs du dossier peinent à expliquer dans ces conditions le refus de Messieurs Bakhtiar et Tumbach. Certains émettent l'hypothèse que des dirigeants ne souhaitent pas perdre de leur influence, ce qui serait le cas si Yves Bontaz accédait au capital du club.
Pendant ce temps, l'eTG se défend sur les pelouses: au classement de Ligue 1, il pointe à la 16e place sur 20, mais de nombreux observateurs le voyaient plus loin encore. Notamment à cause des affaires qui minent ses hautes sphères et de l'argent qui vient à manquer suite au retrait de Danone.
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34 actionnaires remontés
Certains les surnomment «les Parisiens» car ils résident souvent dans la capitale. Ils sont 34 et détiennent 35% du capital de la holding qui détient 90% des actions du Evian Thonon Gaillard football club (eTG). Suite à l'éviction de Patrick Trotignon du club en décembre 2013 et face à ce qu'ils considèrent comme un «hold-up du club par certains administrateurs», ils souhaitent tous se retirer. Vendre leurs parts. L'ex-bâtonnier de Chambéry François Cochet a été mandaté pour les représenter.
On ne pourra pas leur reprocher de vouloir partir car ils ne connaissent rien au football. Trois anciens champions du monde en la matière figurent parmi eux: Zinedine Zidane (avec 400 actions, ils détient 2% des parts; les autres en ont 200 chacuns, donc 1% des titres, qui valaient quelque 10'000 euros au moment de leur achat en 2009), Bixente Lizarazu, reconverti en consultant sportif, et Alain Boghossian, désormais entraîneur et commentateur. L'homme politique et avocat André Soulier, également présent, n'est autre que le président de la commission juridique de la ligue de foot professionnelle en France, celle qui homologue notamment l'ensemble des transferts.
D'autres grands noms hexagonaux figurent dans ce groupe, de l'animateur de télévision Michel Denisot au patron de l'opérateur hôtelier Accor Sébastien Bazin en passant par le chef cuisinier Marc Veyrat. Plusieurs autres hommes d'affaires connus peuvent encore être mentionnés, comme le président du groupe Eurazeo Patrick Sayer, le grand avocat Lionel Koehler-Magne, Jacques Bungert, président de la société vestimentaire Courrèges, ou encore Jean-Claude Condamin, patron de la société immobilière Sainte Colombe, celle qui bâtit les plus hauts gratte-ciels de Lyon. (TDG
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